Forks... En plus de deux cents ans sur cette terre, je n'avais pas eu le loisir de visiter cette ville. De prime abord, je comprenais pourquoi. J'aimais les veines remplies de vitamine D. Ici les nuages éteignaient tout espoir de soleil et donnaient des allures fantomatiques aux habitants.
Si je venais ici, c'était pour les nouveaux rois qui siégeaient. J'allais faire allégeance devant Eliez, dont le règne me paraissait cent fois plus prometteur et intéressant que ces prédécesseurs italiens. Je ne comptais même pas les Cullens. Ce qu'ils avaient fait était tout, sauf un règne.
Bref, avant d'entrer à la Cour, je voulais être repue, pour être certaine d'être en pleine forme. Je n'avais pas particulièrement faim, mais c'était une précaution. J'allais intriguer parmi les grands, et comme toujours, cela me rendait nerveuse. Jouer la comédie de celle qui n'a peur de rien et qui surplombe tout le monde me prenait beaucoup d'énergie morale.
Mais depuis que je tournais en voiture, je ne voyais que des têtes désespérément pâles, ce qui me fichait le moral à zéro. J'avais une vraie passion pour le sang humain. Cela me rendait folle, j'étais du genre limite boulimique. S'il allait falloir se contenter de ce que je voyais, j'allais faire une dépression ici...
Mais il y avait la réserve indienne. Ce qui promettait des peaux plus bigarrées, du sang un peu plus costaud. Quand on oublie cette sale odeur que ces loups dont j'avais entendu parler laissaient partout.
Lorsque j'aperçus en bordure de forêt, un adolescent pénétrer dans les bois, son teint halé et ses cheveux de jais me rassérénèrent.
Je me garais prestement. Et attendait quelques minutes qu'il s’enfonce parmi les arbres.
C'était une belle journée pour se promener. Une belle journée pour mourir...
Je descendis tranquillement de mon véhicule et tout en entrant à mon tour parmi les feuillages, j'inspirais profondément pour suivre ma victime.
Bien entendu, cette odeur de loup Quileute flottait toujours dans l'air, piquant mes narines. Mais l'humain avait malgré tout une délicieuse fragrance. Il était jeune et je salivais déjà du plaisir de plonger mes canines dans sa chair ferme. De sentir ses muscles se durcirent tandis qu'il se débattrait...Une incorrigible gourmande, je sais !
Je n'étais plus très loin derrière lui, quelques brins d'herbes crissaient sous mes pas. Je n'étais pas hyper discrète. J'aimais le plaisir de la chasse. Même si je ne la faisait jamais durer trop longtemps. La peur lançait des hormones dans le sang qui en dénaturaient le goût. Or, j'avais toujours été très bio comme fille. La nourriture saine était très importante à mes yeux. XD

Le jeune homme marchait toujours tranquillement, et j'aspirais son odeur avec appétit. J'étais désormais à quelques mètres derrière lui. Je l'aperçus trébucher et murmurer des jurons. Cela me fit sourire en même temps que ça m'inquiétait, il ne fallait pas qu'il s'abîme et qu'il commence la fête sans moi. C'est moi et moi seule qui ferait couler son délicieux sang.
Je m'arrêtais derrière lui, à deux ou trois mètres, mit les mains dans mes poches et souris.
-Bonjour, déclarai-je d'une voix doucereuse, tu es perdu jeune humain ?
Il y avait toujours cette odeur de loup quileute sur lui, mais j'étais certaine que celui-ci était parfaitement humain. Enfin, du moins pour le moment. Sa chaleur corporelle me semblait légèrement supérieure à celle d'un être humain. Je savais que leur première mutation commençait par cela, une forte fièvre, et pour lui, elle n'allait peut-être pas tarder. Cette science me venait du clan Volturi. Il y avait cent ans de cela, les Cullens les avait accueilli en présence des " modificateurs " . Ces créatures jusqu'alors inconnues des vampires, avaient fait parler d'elles et les enquêtes sur leur comptes, ainsi que les conversations avaient proliféré.

Le jeune homme se retourna, s’apercevant enfin de ma présence et me regarda surprit, avant de me saluer. Ma façon de lui parlait l’aiguillonnait déjà sur l'étrange tournant qu'allait prendre cette entrevue. Tant mieux, je n'allais pas non plus y passer la journée.
Je souris à sa dernière question.
-Je veux dire que ...
Je m'approchais à vitesse vampirique tout près de lui avant d'avoir finit ma phrase.
J'empoignais sa gorge délicatement d'une main ferme et appliquait l'autre dans son dos, afin de le coller contre moi. J'aimais sentir le corps de ma victime, sentir sa chaleur.
-Je veux dire par exemple que tu ferais un excellent repas.
Mon visage était à quelques centimètres du sien, prisonnier dans mon étreinte de glace, il était à ma merci. Je fermais les yeux pour mieux respirer son odeur.
Et caressais d'un doigt sa veine palpitante, là, sur sa gorge brûlante. Cela me remplissait davantage du désir de le boire à satiété. Si jeune, si tendre, si mignon...

Il fallait que je morde désormais, même si je n'avais pas une grande soif à la base, le tenir ainsi tout contre moi devenait insupportable, ma gorge brûlait. Je m'apprêtais à me pencher sur sa gorge lorsqu'il parla. Je m'arrêtais net et le regardais.
-Quel truc ? demandais-je. Tu veux dire, que quelqu'un t'as déjà parlé de nous ?
J'étais curieuse, jamais aucun humain n'avait dit ça alors que je m'apprêtais à le tuer. La plupart du temps c'était " pitié " ou des choses de ce genre. En même temps, j'aurais du m'en douter, avec une telle odeur de quileute sur lui, il devait forcément savoir certaines choses. Même si leur stupide lois du silence les empêchait de parler abondamment.
En même temps, quelle importance ça faisait qu'il sache ce que j'étais. J'allais le tuer de toute façon. Me laisser distraire n'était peut-être pas une idée lumineuse...